vendredi 17 mai 2013

Maux de moi....


Au commencement de toutes choses il y a cette petite fille en larmes

toute en déchirures et en explosions


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille en zébrures

en miroirs à l'infini, démultiplication


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille écartelée

en morceaux collés bords à bords


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille martelée

sculptée, pétrie, malaxée, infinitudes des gestes


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille violences

empoignée, exigée, redessinée à l'infini des autres


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille solitude

et peurs, et colères, rouge, sang, griffures


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille culpabilité

abandon, questions, pourquoi, comment, où, quand


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille espoir

rêves, cauchemars, haine, s'il vous plait, non, oui, fuite


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille obscurité

mourir, vivre, respirer, laisse moi, touche moi, va t'en, donne moi


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille écriture

petits papiers des riens, tout, mal, peur, rires, cicatrices


Au commencement de toute chose il y a cette petite fille naissance


Maux, mots

Maux de moi....


Mariem mint DERWICH
(Photo : oeuvre de l'artiste Marie Louise Bodirsky)

L'instant parfait....














Il est des moments doux

soie feutrée des mots

langueur des sons


Dans la plénitude

l'instant parfait.


Il est des rondeurs

des lettres à broder

des ailleurs immensités


Dans la plénitude

l'instant parfait.


Il est des musiques

des notes infinies

des présences fantômes


Dans la plénitude

l'instant parfait.


Il est des enfouissements

des profondeurs

des lits de velours


Dans la plénitude

l'instant parfait.


Il est des routes

chemins de sable

le commencement de toute chose


Dans la plénitude

l'instant parfait.

Il est....
Mariem mint DERWICH

dimanche 5 mai 2013

Seules.....

Nous sommes toujours seules. Dans la touffeur des multitudes de la famille élargie, nous sommes seules. Solitudes parmi les solitudes de ceux qui peuplent nos maisons et nos vies. Petits grains d'une chaîne immense qui nous tisse mutuelles sans percevoir nos solitudes. Nous sommes tellement porteuses de tous les pluriels de nos entourages que plus personne ne voit que nous nous portons seules.
Nous sommes élevées comme projections de tous les fantasmes des notres. Nous sommes images, rêves, permanences, fulgurances des passés remaniés à la hauteur de toutes les douleurs des présents.
Derrière le masque lisse qui est le notre, masque modelé dans l'acceptation de destins présupposés être le fil conducteur de nos vies, nos solitudes nous écartèlent.
Nous vivons dans le monde. Nous hurlons dans nos mondes.
La femme hurle dans ses silences et sourit dans l'apparence de vie.
Elle est seule à percevoir la perversité de l'image que la société a d'elle : image maternelle, image aimante, image de douceur, image de reproductrice, image de frivolité, image tatouée...
Elle sait les poèmes, les chants, les hommages. Elle sait nos hommes amoureux de cette image et passant leur vie à se démultiplier dans les regards féminins, s'y noyant jusqu'à la jouissance, acharnés qu'ils sont à reculer la mort en se fondant dans ces multiples féminins, catharsis orgasmique.
Elle sait les luttes quotidiennes, le lent défilement des minutes, des secondes, des instants de la survie.
Dans sa solitude la femme est folie, cris, joues griffées, cheveux secoués, spasmes dans le ventre, vomissements, sangs, ongles, rages, perfidies...
Elle est ces envies de mort, de défiguration, de laminage des barrières. Elle est poings levés. Elle est ces corps qui se roulent par terre, mains vers l'infini, jambes ciseaux ouvertes, peau qui brûle.
Elle est détestation de soi. Et des autres.
Elle se pare, se dessine. Cisèle sur ses yeux les couleurs de l'attrait. Sculpte ses joues. Se fait autre, se crée autre, celle des autres. Elle se fait séduction car elle sait ce que l'on nous apprend : que la séduction, le mensonge, l'apparence, la sexualité comme arme, sont les seuls moyens de survie.
Alors elle se fait vestale, actrice de ses propres souffrances.
Nos femmes se font mises en scène, dansant dans l'érotisme du dialdiali, de l'encens, des parfums, des fards, des douceurs / promesses...
Dans cette schizophrénie des sentiments, elles se sculptent patiemment, offrandes consentantes d'un jeu de mort.
Nous sommes toujours seules, dans le silence de l'agonie, la permanence des destins, le bruit léger des mots....
Mariem mint Derwich

Poser ses mains sur son visage....







Poser ses mains sur son visage,
occulter les yeux,
les fermer,
les rayer de tout

Poser ses mains sur son visage
et couler, doucement

Poser ses mains sur son visage
clore la bouche
empoigner sa mémoire
la vider

Poser ses mains sur son visage
pour ne pas saigner

et encore et encore,
affronter, empoigner,
poussière de mémoire après poussières,
batailles  de sang

Poser ses mains sur son visage,
et vaincre

Poser ses mains sur son visage,
hurler jusqu'à l'infini des étoiles,
hurler à briser sa voix,
à mourir

Poser ses mains sur son visage,
se regarder, éclater en autres

Poser ses mains sur son visage,
et taper, taper,
taper encore.
Crever.

Poser ses mains sur son visage,
casser le miroir....

Mariem mint Derwich


(Photo : oeuvre de David  Walker)