vendredi 28 janvier 2011

Ecritures amoureuses...

J'ai écrit sur ton corps les chemins de traverse
J'ai promené mes envies le long de tes flancs
j'ai murmuré dans ton cou les chansons de demain
j'ai posé mon front sur tes yeux pour y boire mon reflet
j'ai chanté les caresses et les cicatrices
j'ai fait de mes jambes des mondes d'ailleurs
j'ai bâti mon ventre pour t'abriter

j'ai ployé ma chevelure pour t'y enfermer
j'ai fait s'envoler mes mains jusqu'à la déraison des choses
j'ai été centres et bords
espaces et clôtures
cils et lèvres
j'ai été le milieu de toutes choses
vois la cambrure de mes reins et danse...
Salomé

Les reflets de soi deviennent les illusions des autres...

On parle toujours des mauresques avec tant de superlatifs si peu flatteurs qu'il faudrait presque avoir honte de naître mauresque. Elles sont considérées comme paresseuses, indolentes, âpres au gain, frivoles, gloutonnes, peu maternelles,  superficielles jusqu'à la caricature, menteuses, commères, dispendieuses... Ces paroles d'homme nous les entendons tous les jours : d'hommes célibataires ou mariés. Ôh il n'y à pas que les hommes maures pour dire cela! Pour les Soninkés ou les Halpulaar, être une mauresque c'est être objet de mépris et de blagues.
Nos sociétés s'opposent jusque dans le féminin et l'image fantasmée que l'on se fait de l'autre.
Les Mauresques diront, en réaction, que chez ces mêmes Soninkés ou Halpulaars les femmes sont soumises, inférieures, acceptant la polygamie, travaillant jusqu'à l'excès, bavardes, etc...
Et chacun de se renvoyer le miroir. Les reflets de soi deviennent les illusions des autres.
Et au milieu, nos hommes qui surfent sur les courants divers et qui prennent ce qui les arrangent et rejettent ce qui leur demande par trop de réflexions.
Mais tous ces poncifs sur un soit disant "modèle féminin" font oublier les mille et une réalités des femmes de chez nous.
Quand la mauresque de la bourgeoisie se complait dans un avachissement qui la réduit au statut de femme enfant gâtée, des milliers d'autres Mauresques errent dans la réalité de la dureté de la vie.
Il est vrai que la société maure a poussé la subtilité jusqu'à faire de ses femmes, dans un milieu naturel hostile, des objets de décors adorés, chantés, loués. Et plus la "noblesse" est grande plus l'indolence est un art de vivre, comme un pied de nez aux immensités terrifiantes du désert.
Mais pour fabriquer l'indolence ont été inventés les "outils de la paresse" : les esclaves, les petites bonnes qui élèvent les enfants à la place des mères, les servantes corvéables à merci à qui l'on demande tout et n'importe quoi.
Nos femmes/fleurs/bourgeoises se complaisent dans le rien futile de vies ennuyeuses à l'excès.
Dans l'ennui se construisent les indolences faciles.
Mais les autres, les travailleuses, les bosseuses, les forçats de la survie?
Nos sociétés si masculines ont mis au point de multiples façons d'asservir un être jugé inférieur et immature : l'excision, la pseudo noblesse qui sert à enfermer ses femmes dans un schèma castrateur, la polygamie, la servitude, la poésie...
Plus une société chante ses femmes plus ces dernières sont prisonnières.
Irait on chanter les travailleuses?
Non : il est plus "doux" de chanter la potiche. Qu'on la chante en hassaniya, en wolof, en pulaar, en soninké, en bambara, on sublime les barreaux de la prison.
Chez les maures l'ultime vengeance, inconsciente, des femmes est cette paresse présupposée : tu me veux minuscule, occupe toi donc de moi.
Tu me veux enfant, élève moi.
tu me veux fleur, arrose moi.
Tu me veux, épouse moi.
Et en terme de prison aucune société de chez nous ne peut se vanter d'avoir libéré ses femmes; la polygamie, par exemple, est l'enfermement ultime, la négation de toute forme de dignité. Nous sommes si peu considérées que nous ne méritons, semble t'il ,que ce mesquin partage d'un homme avec d'autres femmes. Nous n'existons que le jour de notre "tour". Nous sommes enfermées dans des combats de survie : tout faire pour être la préférée, pour que nos enfants soient en haut et non en bas, pour déjouer les jalousies des autres, pour s'assurer une vieillesse à l'abri du besoin... Et pendant ces combats la société peut dormir tranquille car, alors, les femmes s'usent dans le quotidien et perpétuent les traditions.
Les barreaux de nos cages sont si pervers que nous les entretenons tous les jours.
Car si les diktats de nos sociétés sont érigés par les hommes,  l'acceptation de la soumission est féminin.
Seules les femmes peuvent briser les barreaux.
Que ne l'apprend t'on pas aux petites filles?

Salomé

lundi 3 janvier 2011

Noces de mort, suite....

Un commentaire laissé par un homme au sujet de "noces de mort" nous inspire plusieurs réflexions.
Oui, nos femmes sont infantilisées par une éducation qui ne sait pas trop quoi faire de cette "femelle" arrivée dans la famille et dont on dit qu'elle est la source de quasiment tous les maux. Oui, elles sont "lâchées" dans la nature du mariage avec juste les recommandations de la bienséance. Objet d'alliances et d'orgueil, les petites filles sont élevées comme de futures reproductrices : des mères futures, des drapeaux familiaux, des reproductrices d'un soit disant honneur qui veut que le nom d'une famille ou d'une tribu ne réside que dans le sang de la défloration. Elles sont porteuses de tous les espoirs : celui de l'ascension sociale. Le but du "jeu" c'est de faire le BON mariage, celui qui apportera prospérité financière à la jeune "pouliche" et, de bien entendu, à toute sa famille. Car, chez nous n'est ce pas, c'est toute une famille que le marié reçoit en dot et qui dort, inconsciemment, dans son lit.
Notre commentateur ne réduit la femme épousée qu'à l'appât du gain.
Mais c'est bien la société, édictée par les hommes, qui a donné cette place à ses femmes.
Ne nous apprend t'on pas, au cours de nos adolescences, qu'hors mariage point de salut? Qu'hors mari une femme est une femme perdue, chose bizarrement regardée, honte de la famille?
La modernité parle d'éducation et on envoie de plus en plus de filles faire des études mais reste toujours, en ligne de fond obligatoire, LE mariage.
Bien sur, pour pouvoir faire ce mariage "rêvé", avec un homme aisé si possible, les femmes utilisent ce qu'on leur a appris : la séduction et les promesses de délices inimaginables prompts à faire saliver la proie. Cela dénote un esprit de survie extraordinaire.
Pour "attraper" l'homme on promet, on caresse, on ose toutes les gestes du moment que l'on garde les cuissses fermées. Ce sexe féminin est proposé comme récompense ultime, le jardin des délices à ne savourer qu'après mariage.
Et dans une société masculine malade de désirs et handicapée sentimentalement, ils sont nombreux les hommes à promettre monts et merveilles juste pour le plaisir de se tremper à la source.
C'est le jeu pervers de notre société.
Et celui qui pensait épouser une odalisque de l'amour se réveille avec une fille "bien" qui use du sexe comme chantage pour obtenir ce qu'elle veut. Elle est là pour ça non? Infantilisée, réduite à un fantasme, obligée de monnayer pour assurer sa survie matérielle dans une société où les hommes papillonnent à tout va, menés par le bout de leur ...nez.

Nos hommes se plaignent des "glaçons" ignorants qu'ils retrouvent dans leurs lits, lieux fantasmés de tous les désirs et de toutes les attitudes supposées permises. Et s'en vont très vite, après mariage, chercher ailleurs ce qu'ils ne trouvent pas dans leur moitié. C'est souvent dans les bras d'autres femmes mariées, plus âgées si possible, considérées comme plus expertes, que nos hommes vont se consoler. Avec l'amante tout est permis. Avec sa femme légitime on "copule", on fait avec, on rêve d'autres choses mais on joue le jeu.
Il est vrai que nos hommes sont aussi à plaindre car, englués dans les contradictions de nos sociétés, ils font le grand écart entre éducation et envies.
Il est vrai aussi que le rôle qui leur est dévoué, à savoir celui qui va dépuceler la donzelle désirée, est un rôle ingrat. Le premier geste d'amour physique qu'ils doivent faire est un geste de sang : offrir la souffrance comme mots d'amour. Quelle pitié!
Mais après ce geste "héroïque" combien d'entre eux se sont réellement interessés à la jeune femme qui est allongée à leurs côtés?
Savent ils les gestes d'épanouissement? Un corps de femme n'est pas que chair. Il est esprit. Et on fait l'amour et avec sa chair et avec son esprit.
On "baise". Mais on apprend à faire l'amour.
C'est là toute la différence...
Alors, tant que nous ferons de nos filles des enfants perpétuelles, nous mériterons les tactiques de survie féminines.
Le piège de la mort des sentiments tue aussi....
Salomé